
Le voyage épique de Giulia Baroncini : sur les traces de Luigi Masetti
À une époque où beaucoup préfèrent le confort de leur canapé, Giulia Baroncini, connue sur Instagram sous le nom de @semicercatesonoingiro, se distingue comme une exception extraordinaire. Réfractaire à la stagnation et animée par un désir insatiable d'explorer le monde, Giulia a entrepris en 2023 un voyage épique, retraçant la route légendaire de Luigi Masetti, le premier voyageur à vélo d'Italie, de Milan à Chicago.
L'inspiration : Luigi Masetti, l'anarchiste sur deux roues
Luigi Masetti, né en 1864 à Trecenta dans le Polesine et connu sous le nom de "l'anarchiste sur deux roues", est considéré comme le pionnier du cyclotourisme italien. Sa soif d'exploration l'a conduit en 1893 à entreprendre un voyage de Milan à Chicago pour assister à l'Exposition colombienne mondiale, une célébration du 400e anniversaire de la découverte de l'Amérique. Ce voyage de 7 000 kilomètres l'a conduit à traverser des montagnes, des plaines et des océans avec pour seule compagnie son vélo.
Après son premier "grand voyage" à travers l'Amérique, Masetti a continué à chercher de nouveaux défis. En 1897, il a voyagé de Milan à Aoste, puis à travers l'Italie jusqu'à Brindisi, et a continué jusqu'en Égypte, suivant les traces de Napoléon. Son voyage le plus extraordinaire a eu lieu en 1900 lorsqu'il a pédalé de Milan au Maroc, puis à travers l'Europe jusqu'au Cap Nord, pour terminer en Russie où il a rencontré Léon Tolstoï.
Malgré la disparition inexplicable de sa renommée et sa mort mystérieuse en 1940, l'héritage de Masetti en tant qu'explorateur indépendant et visionnaire du cyclotourisme perdure, inspirant de nouvelles générations à repousser les limites personnelles et géographiques. Giulia, inspirée par la lecture de "L'anarchico delle due ruote" de Luigi Rossi, a décidé de retracer ce voyage, en l'adaptant aux temps modernes.

L'itinéraire moderne de Giulia
Giulia est partie le 9 juin 2023, un mois plus tôt que Masetti. Son aventure a couvert une route de 8 000 kilomètres, avec des étapes quotidiennes d'environ 80 kilomètres, flexibles en fonction des conditions météorologiques et des rencontres en chemin. Elle a évité de se presser, savourant la progression lente, les paysages changeants et la beauté de chaque territoire.
Le voyage de Giulia a suivi le parcours de Masetti aussi fidèlement que possible. Malgré les 130 années écoulées, de nombreuses parties de la route coïncidaient avec les itinéraires modernes d'EuroVelo, le réseau européen de pistes cyclables. Le 13 juillet, elle a pris l'avion de Londres à New York, contournant la croisière coûteuse et commerciale de Southampton. Aux États-Unis, elle a voyagé de New York à Chicago, s'arrêtant à Albany, Buffalo, aux chutes du Niagara et au lac Érié.
Le 28 septembre, elle est retournée à Londres et a commencé son voyage de retour, traversant la France du nord au sud jusqu'à ce qu'elle franchisse la frontière à Vintimille. À l'origine, Masetti était revenu avec un navire de la Cunard Line de New York à Liverpool, un navire qui n'existe plus aujourd'hui.

Nouvelles expériences et défis
Giulia a entrepris ce voyage dans l'anonymat complet, ne le révélant à personne jusqu'à deux semaines avant son départ. "Personne ne savait pour le voyage ; je le faisais pour moi-même", a-t-elle déclaré, soulignant sa détermination à partir.
En chemin, Giulia a vécu de nombreux hauts et bas, affrontant des défis qui l'ont mise à l'épreuve. Ce sont ces moments difficiles qui ont rendu les bons souvenirs encore plus précieux. Des moments de joie qu'elle portera avec elle pour toujours, témoignage d'un voyage riche en émotions et en leçons.
Le col du Gothard s'est avéré particulièrement difficile pour Giulia, en particulier pour quelqu'un sans expérience préalable en voyages longue distance à vélo. Pourtant, grâce à sa force mentale, Giulia l'a surmonté.
Aux États-Unis, Giulia a rencontré une hospitalité extraordinaire, contrastant fortement avec les stéréotypes souvent négatifs sur la culture américaine. Partout où elle allait, les gens étaient prêts à lui ouvrir leurs portes. Cette hospitalité chaleureuse a rendu son voyage inoubliable.
Le retour chez elle a été tout aussi ardu. À Chicago, Giulia a ressenti un moment de démotivation, décrivant les deux mois de voyage comme deux années de vie intense. Pendant son voyage aux États-Unis, elle a affronté des pluies torrentielles et un climat très différent de celui auquel elle était habituée. En France en octobre, les conditions météorologiques ont posé d'autres défis, avec des températures allant de 4 degrés le matin à 30 degrés pendant la journée. Ce voyage a testé sa résilience mais lui a également offert des expériences et des émotions qui resteront à jamais gravées dans sa mémoire.

Le mode de voyage
Giulia a choisi un vélo gravel pour son voyage, équipé de diverses sacoches de bikepacking pour maximiser la capacité de transport. Ses vêtements provenaient de notre collection gravel, conçue pour le confort et la durabilité, afin de supporter de longues journées en selle
Pour l'hébergement, Giulia s'est inspirée de Masetti, utilisant des plateformes comme Warmshowers et Couchsurfing pour trouver l'hospitalité locale, complétée par du camping sauvage et, dans les cas extrêmes, par Airbnb ou des hôtels. Son objectif était de vivre au plus près des habitants, découvrant différentes traditions et cultures.
Les raisons derrière le "grand voyage"
Giulia a décidé d'entreprendre ce voyage pour plusieurs raisons. Tout d'abord, elle voulait rendre visible Luigi Masetti, un pionnier du cyclotourisme largement méconnu en Italie. Rendre hommage à Masetti était pour Giulia un moyen d'honorer le passé et de faire connaître son histoire extraordinaire à un plus grand nombre de personnes.
Au-delà de cela, Giulia souhaitait défier le paysage mondial féminin, inspirée par des figures historiques comme Alfonsina Strada et Annie Londonderry. Ces femmes ont transformé le vélo en un outil d'émancipation, démontrant que le voyage en solitaire n'est pas un tabou pour les femmes. À travers son voyage, Giulia voulait inspirer d'autres femmes à repousser leurs limites et à vivre des aventures inoubliables.

Un message de durabilité et de solidarité
Giulia voulait transmettre un message de changement radical et de choix de vie, promouvant le vélo comme une alternative durable à la voiture. Son voyage a démontré comment le cyclisme peut transformer non seulement le voyage mais aussi la vie elle-même, offrant une existence plus lente et plus consciente, en harmonie avec l'environnement.
Le voyage de Giulia Baroncini n'était pas seulement une aventure personnelle, mais aussi une profonde expression de valeurs telles que le respect de l'histoire, la promotion de l'émancipation féminine et la sensibilisation à un mode de vie durable et solidaire. Ce voyage a réaffirmé que les limites sont souvent des barrières mentales et que le monde est prêt à accueillir ceux qui sont prêts à l'explorer avec respect et curiosité. Le vélo peut être un puissant outil de changement, capable de transformer non seulement le paysage que nous traversons, mais aussi notre perspective et notre façon de vivre.